
Le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov est attendu, aujourd’hui, à Alger pour une visite de deux jours à l’invitation de son homologue Ramtane Lamamra.
Par Feriel Nourine
Les deux responsables s’étaient entendus sur cette visite le 5 avril dernier, lors de la présence à Moscou de M. Lamamra dans le cadre d’une mission de bons offices dépêchée par la Ligue arabe. Le chef de la diplomatie algérienne s’était déplacé dans la capitale russe en compagnie des ministres des Affaires étrangères de Jordanie, du Soudan, de l’Irak et de l’Egypte, en sus du Secrétaire général de la Ligue arabe, dans le but de lancer des concertations avec les responsables russes et contribuer à une solution diplomatique à la crise ukrainienne. S’en était suivie une visite de la même mission à Varsovie, en Pologne, pour y rencontrer le ministre ukrainien des Affaires étrangères Dmytro Kuleba.
Lors de sa rencontre avec son homologue algérien, M. Lavrov avait manifesté son intention de concrétiser «prochainement» une visite en Algérie, prévue de longue date. Ce dernier s’était déjà déplacé à Alger en mai 2019. Moins de deux semaines après la rencontre Lamara-Lavrov en Russie, le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a reçu, le 18 avril dernier, une communication téléphonique de son homologue russe, Vladimir Poutine, qui a vu les deux chefs d’Etat échanger des félicitations à l’occasion du 60e anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques entre les deux pays et exprimer «leur satisfaction pour les progrès enregistrés par la coopération bilatérale dans tous les domaines».
Et c’est visiblement lors de ce même entretien que la date de la visite de M. Lavrov en Algérie a été fixée, sachant que MM. Tebboune et Poutine se sont également accordés sur les visites de haut niveau entre les dirigeants algériens et russes, ainsi que sur la prochaine réunion de la commission conjointe de coopération économique. En ce sens, le chef de la diplomatie russe sera accompagné de plusieurs responsables russes et sera reçu par Abdelmadjid Tebboune.
Cette visite devrait s’inscrire dans la continuité de celle effectuée à Moscou par M. Lamamra, durant laquelle il avait eu une séance de travail avec M. Lavrov, avant de s’entretenir avec le chef du Conseil de sécurité russe Nikolaï Patrouchev, autour des axes et des perspectives de renforcement de la coopération entre les deux pays. Mais la présence à Alger du chef de la diplomatie russe intervient, en premier, dans une conjoncture internationale marquée par la guerre entre la Russie et l’Ukraine qui a vu les pays occidentaux multiplier les sanctions à l’adresse de Moscou.
Une démarche à laquelle l’Algérie refuse d’adhérer en défendant le principe qui «permet aux mécanismes onusiens compétents de s’acquitter pleinement de leurs mission et rôle conformément aux règles du Droit international et aux résolutions pertinentes de l’ONU, loin de toute ingérence ou préjugé, et constitue pour l’Algérie une condition sine qua non en vue de prouver les faits concernant toute violation grave et systématique des droits de l’Homme», ne cessent de répéter les diplomates algériens depuis le début de la guerre en Ukraine, en février dernier.
En ce sens, l’Algérie n’a pas hésité, début avril, à voter contre la décision de suspension de la Fédération de Russie du Conseil des droits de l’Homme, une résolution présentée au vote par un groupe de pays occidentaux, lors de la session extraordinaire de l’Assemblé générale de l’ONU, consacrée à la crise ukrainienne. C’est d’ailleurs dans ce même sens que, lors de leur entretien téléphonique, les Présidents algérien et russe ont souligné «l’importance d’une solution politique conforme aux principes du droit international et de la Charte des Nations unies». Ils ont aussi procédé à un échange de vue sur la situation internationale, relevant les graves développements affectant la sécurité des citoyens palestiniens, ainsi que les atteintes à la sacralité des lieux saints de l’islam à El-Qods, tout en réaffirmant le soutien de leurs pays à une paix juste et durable au Moyen-Orient devant consacrer les droits nationaux inaliénables du peuple palestinien.
La position algérienne face à la crise ukrainienne a, d’ailleurs, été saluée par l’ambassadeur de la Fédération de Russie en Algérie, Igor Beliaev. Lequel a remercié l’Algérie pour sa «position équilibrée vis-à-vis de la crise ukrainienne», se félicitant par là même «des positions exprimées par les parlementaires algériens ayant participé récemment, en Indonésie, aux travaux de l’Assemblée générale (AG) de l’Union interparlementaire (UIP)».
Outre le renforcement de la coopération entre les deux pays dans plusieurs secteurs, sur la base de «relations distinguées» et «historiques», cette visite devrait porter sur le dossier du gaz qui fait l’actualité en tant qu’enjeu cardinal dans cette guerre en Ukraine, à travers la hausse des prix mais surtout à travers le projet d’embargo de l’UE contre le gaz russe, en comptant sur des alternatives à trouver chez d’autres producteurs, dont l’Algérie.
Reporters