Les scandales liés à la mauvaise gestion de l’Entreprise nationale de transports maritimes des voyageurs (ENMTV), plus connue sous son nom commercial Algérie Ferries, ayant conduit son PDG et d’autres cadres à la casa prison, continue de rythmer cette saison estivale 2022 avec des bévues qui ne s’arrêtent pas et qui accentuent chaque jour le naufrage de l’entreprise nationale.
En effet, hier, ont encore circulé des images qui ternissent l’image de l’Algérie à travers les vidéos de pagailles et de voyageurs en rade au port de Marseille après l’annulation surprise d’une traversée vers Alger. Exaspérés, les voyageurs à bout de patience ont bloqué le portail du port, ce qui a nécessité l’intervention des forces de l’ordre françaises pour débloquer la situation.
Depuis le 2 juin dernier, sans PDG et sans hauts responsables de différents départements cruciaux pour réguler l’important flux de voyageurs durant l’été, et après deux années de suspension, l’entreprise est emportée dans un courant de défaillances qui conforte de plus en plus l’hypothèse d’un complot pour faire couler le pavillon national.
Pour revenir aux incidents de la veille, au départ, Algérie Ferries avait projeté d’opérer pour la journée du mercredi 29 juin deux traversées entre Marseille et Alger, ajoutant une seconde traversée en plus de celle opérée habituellement par le Badji Mokhtar III. Par conséquent, des centaines de clients ont acheté des billets pour cette traversée supplémentaire qui devait être opérée à bord du navire Djazaïr II. Mais, une fois arrivés au port de Marseille, ils découvrent que la compagnie nationale maritime a modifié la date de cette traversée supplémentaire sans prévenir au moins une partie de ses clients qui avaient réservé, selon les différents témoignages, relayés sur les réseaux sociaux. S’en est suivie une énorme pagaille à l’entrée du port de Marseille.
Dans un live diffusé en début d’après-midi sur Facebook, le député de l’émigration Tawfik Khedim a tenté de calmer les esprits. Il a tenu à rassurer les voyageurs dont la traversée a été annulée : « Tous les passagers qui n’ont pas pu embarquer vont être pris en charge via une indemnisation et vont voyager demain. S’il vous plaît. Laissez les passagers du Badji Mokhtar embarquer de façon normale.» Malgré ces assurances, la colère persistait parmi les voyageurs dont certains ont essayé par la force de monter sur le premier navire.
De son côté, le député Abdelouahab Yagoubi a publié des vidéos filmées par des passagers qui devaient rejoindre Alger par cette traversée. L’auteur des vidéos parle de deux annulations successives, le 28 et le 29 juin. « Le responsable nous a dit que le système nous a envoyé les billets par erreur. On est venus le 28 et ça a été annulé sans nous prévenir. Ils ne nous ont envoyé ni messages, ni mail, ni rien. Et là, le 29, c’est aussi annulé», témoigne un voyageur.
Cet énième scandale d’annulation de traversée vient se greffer à celui des navires effectuant des traversées quasiment vides, dont les récentes révélations des résultats préliminaires de la seconde enquête diligentée dans l’affaire du navire Tassili II ayant effectué, début juin, une traversée Marseille-Skikda quasiment vide, montrent qu’il s’agissait d’une « action délibérée avec la complicité des responsables de l’ENTMV».
Le Procureur de la République près le Pôle pénal national économique et financier de la Cour d’Alger avait ainsi affirmé, dans un communiqué publié mardi dernier, que « les résultats préliminaires montrent la réalisation, de manière délibérée, de réservations virtuelles sur le système de réservations de l’entreprise au niveau central pour empêcher les voyageurs de faire des réservations».
Reporters / Par Sihem Bounabi